Procédure d’appel d’une décision de liquidation judiciaire concomitante à un plan de cession (suite et fin ?)
Faisant suite à mon précèdent billet sur ce sujet, je ne résiste pas à l’envie de partager avec vous un exemple des difficultés résultant du chevauchement de certaines procédures.
Dans un cas d’espèce où un dirigeant avait interjeté appel d’une décision approuvant un plan de cession et prononçant la liquidation judiciaire de sa société, ce dernier n’avait pas suivi la procédure à jour fixe telle que stipulée par l’alinéa 2è de l’article R661-6 du code de commerce.
L’appel était toutefois régulier puisque la procédure à jour fixe n’est qu’une modalité procédurale.
Il est peut être nécessaire de préciser que la Cour de Cassation dans le cas précis d’un jugement de liquidation et de cession permet l’utilisation de la procédure prévue pour critiquer le plan de cession, certes, mais permet aussi le choix de la procédure prévue pour la critique du jugement de liquidation judiciaire.
Ainsi, dans l’esprit de l’appelant, l’appel était principalement dirigé à l’encontre du jugement de liquidation judiciaire qui sonnait la mort de la société et accessoirement à l’encontre du plan de cession qui privait ladite société de l’ensemble de ses actifs.
Or, Il résulte bien de la lecture du 3e de l’article R661-6, que :
« 3° Dans les cas autres que ceux qui sont mentionnés au 2° ci-dessus et sauf s'il est recouru à la procédure à jour fixe, l'affaire est instruite conformément aux dispositions de l'article 905 du code de procédure civile. Le président de la chambre peut toutefois décider que l'affaire sera instruite selon les modalités prévues au premier alinéa du même article ; »
Et le recours à cette procédure d’urgence est parfaitement justifié par les intérêts en jeu, dans l’esprit même du texte de l’article 905 du Code de Procédure Civile, c’est à dire lorsque l'affaire semble présenter un caractère d'urgence.
L’affaire a fait l’objet d’une fixation pour clôture et plaidoirie le même jour à une échéance assez proche sans que la question de la procédure à suivre soit véritablement débattue.
Bien entendu, l’appelant signifia ses conclusions trois mois et un jour après la date de la déclaration d’appel tombant ainsi sous le coup des sanctions de l’article 908 du Code de Procédure Civile, c’est à dire la caducité de l’appel.
Il résultait toutefois d’un état de fait déjà sous l’empire de l’ancien article 910 que l’appelant n’était pas soumis aux caducités de l’article 915, la clôture de la mise en état et la plaidoirie étant souvent décidé pour la même date.
Saisie d’une demande de caducité par Conclusions sur incident selon les termes de l’article 908, la Cour annula les dates de plaidoiries et renvoya l’affaire sur incident à une date plus lointaine, posant ainsi la question de l’intérêt d’un débat au fond alors même que le jugement arrêtant le plan de cession et la liquidation avaient déjà été prononcé plusieurs mois auparavant.
C’est dans ces circonstances que la cour devait se prononcer sur un incident postérieurement à la date de plaidoirie au fond déjà prévue.
Le magistrat de la mise en état se prononcera sur l’incident en déclarant :
« Les appelants avaient jusqu’au 24/10 pour notifier leur conclusions et ne l’on fait que le 25/10, ne respectant pas ainsi les dispositions de l’article 908 cpc alors qu’ils ont choisi d’écarter la procédure à jour fixe de l’article R661-6 2° du code du commerce, ce qui rend applicable cette disposition
L’appel sera déclaré irrecevable. »
Or, l’article R661-6 vise bien la procédure d’urgence et l’article 905.
Par voie de conséquence, la caducité ne semble pas justifiée.
Plus encore, le magistrat se contentera de rejeter l’appel contre la décision arrêtant le plan de cession.
Quid du jugement de liquidation ?
En conclusion, si l’appel semble irrecevable aux termes du jugement sur le fondement de l’article 908 du cpc, il en est autrement s’agissant de la procédure de l’article 905 où aucun délai n’est sanctionné.
Le recours à l’article 905, la procédure d’urgence, en cas de liquidation ne souffre pas de contestation ni dans l’esprit du texte, ni de par son application pratique.
En se décidant uniquement sur le plan de cession et l’article 908, le magistrat de la mise en état oublie à notre sens une partie importante de l’appel, la survie de la société et enlève à la procédure qui en pratique doit se dérouler rapidement, son caractère d’urgence.